Près de la moitié des pannes du réseau de distribution d’Hydro-Québec sont liées à la végétation. Une proportion qui tend à augmenter avec les changements climatiques. En effet, l’intensité croissante des événements météorologiques fait augmenter les chutes d’arbres et de branches sur les lignes électriques. C’est pourquoi la société d’État collabore depuis septembre avec horoma AI, une jeune entreprise québécoise spécialisée dans l’intelligence artificielle appliquée à la détection de la végétation. En joignant leurs efforts, les deux partenaires visent un objectif ambitieux : réduire de 25% le nombre de pannes causées par la végétation.
Entretenir un réseau de plus de 100 000 kilomètres de lignes électriques aériennes n’est pas chose aisée. « On fait des plans d’entretien de la végétation, mais la végétation pousse plus vite que la capacité des élagueurs disponibles au Québec! » se désole Richard Chatigny, chercheur à l’Institut de recherche d’Hydro-Québec. Pour améliorer l’efficacité du traitement, il faut trouver un moyen de repérer les endroits où la probabilité que la végétation interfère avec les lignes est la plus élevée.
La végétation, c’est l’ennemi numéro 1 de tous les services d’utilité publique dans le monde.
Richard Chatigny
chercheur à l’Institut de recherche d’Hydro-Québec.
Dans cette collaboration, horoma AI apporte son savoir-faire en matière d’intelligence artificielle. Habituée à travailler à partir d’images aériennes, l’entreprise a toutefois dû s’adapter à un nouveau type de données. En effet, la proximité d’habitations interdit tout survol par un drone et le survol par avion est trop onéreux. Pour ce projet, l’équipe a donc dû se tourner vers un lidar terrestre, c’est-à-dire un système de télédétection installé sur le toit d’une fourgonnette, qui photographie à 360 degrés et en trois dimensions les lignes et leur environnement.
À l’aide de ces données, les deux partenaires construisent depuis septembre 2019 un algorithme qui optimisera le travail des équipes d’entretien en ciblant les lignes à prioriser et les interventions à effectuer. Mais pour déterminer la vulnérabilité de chaque portion du réseau avec précision, l’équipe doit jongler avec une grande variété de critères dont la grosseur des branches qui font intrusion et leur position par rapport aux câbles ainsi que l’espèce de chaque arbre.
En effet, certaines essences sont plus problématiques que d’autres. « Les individus ne brisent pas tous de la même manière », explique Yvan Ouellet, cofondateur et PDG d’horoma AI. « Un bouleau va plier sans se briser alors qu’un sapin baumier va casser parce que sa structure physique est différente. Une branche d’érable, quant à elle, va craquer et tomber verticalement. » On comprend alors l’importance d’une détection précise dans le calcul du risque.
Mais comment distinguer les espèces quand l’impact de la végétation change non seulement en fonction des saisons, mais aussi de la météo? Sans oublier que les arbres qui poussent le long des lignes sont régulièrement élagués et n’ont donc pas la même forme que s’ils poussaient dans la nature. Un défi complexe que les partenaires s’attellent à relever ensemble. « Actuellement, nous avons assez de données pour prouver que le modèle fonctionne », se réjouit M. Ouellet. « Nous avons bon espoir, en obtenant suffisamment de données, d’atteindre un excellent niveau de précision. »